Bonjour
Pour se faire une opinion dans le cadre du sondage en cours ( https://www.realisonsmtl.ca/consultationbudget2021):
Voici le point de vue de Danielle Pilette, Ph.D., professeure associée, École des sciences de la gestion de l’Université du Québec à Montréal (ESG-UQÀM), qui suit de près ces questions. « Prudence ».
La Ville de Montréal a fait preuve d’un admirable leadership par son importante contribution à la gestion de la crise COVID. Il reste que son territoire a été en 2020 l’épicentre de la crise sanitaire non seulement au Québec, mais au Canada. Parmi les grandes villes, Montréal figure même parmi les plus affectées du monde occidental. Rien n’assure que nous sommes complètement à l’abri d’une 2e vague qui aurait des répercussions jusqu’en 2021.
En 2020, le gouvernement fédéral a pleinement assumé son rôle de stabilisation économique envers la population, les entreprises et les institutions. Toutefois, il s’agit d’un gouvernement minoritaire et il n’est pas non plus à l’abri de soubresauts. Le contexte devrait inciter à Ville de Montréal à une grande prudence, malgré la bonne performance à ce jour du marché immobilier résidentiel montréalais. La prudence requise devrait se traduire tant quant aux investissements hâtifs en immobilisations que quant à la gestion des services, afin de minimiser tout risque de notoriété négative et de perte de confiance des contribuables et des parties prenantes,
Concernant la préparation du budget 2021, la Ville de Montréal a soumis un document qui ne semble pas à l’abri de certaines contradictions. On y affirme notamment dès le début qu’il ne faut pas retourner aux vieux réflexes, mais c’est exactement ce qu’on y propose quand il est question de presser le pas en matière d’investissements en immobilisations, aux fins d’un soutien à une reprise ou relance forte. Or, à tort ou à raison, la présente administration montréalaise était déjà plutôt dépensière et très aménagiste, comme en témoignent la succession et même la poursuite de chantiers parfois étalés sur plus d’une année . Le vieux réflexe de dépenser en immobilisations serait-il justifiable dans l’hypothèse d’une reprise possiblement plus lente et étalée que prévu? Serait-il justifié de soit recourir à un déficit budgétaire, soit augmenter fortement les taxes, peut-être pour longtemps, sans discussion quant aux bénéficiaires visés par un surcroît d’investissements municipaux? La Ville affirme dans son document vouloir soutenir par ces flots de dépenses en immobilisations la population, certes, mais aussi les commerces, dont nous savons pourtant que la vulnérabilité n’est pas seulement conjoncturelle, mais fondamentalement structurelle, et déjà engagée bien avant la pandémie.
À plusieurs égards, la pandémie a agi seulement comme un accélérateur (puissant, il faut l’admettre) de changements majeurs, de différentes natures, dont démographiques, économiques, et urbanistiques. L’association des urbanistes du Maryland, par exemple, se penchera sous peu sur le sujet des transformations urbaines post-pandémies. Mais, à la Ville de Montréal, on semble faite l’économie de la réflexion sur le proche avenir et les tendances territoriales, et on adopte la solution de l’investissement très prochain, voire immédiat, sans tenir compte des paramètres de la nouvelle économie, et sans tenir compte de la délocalisation potentielle à long terme de certaines activités économiques du centre-ville vers des arrondissements plus périphériques correspondant peut-être davantage à certains nouveaux modèles d’organisation et de territorialisation plus déconcentrée . Argument supplémentaire en faveur de la prudence budgétaire: la gestion visiblement déjà laborieuse de tous ces chantiers et travaux qui ont tendance à perdurer au-delà de la tolérance pourtant exemplaire des Montréalais..
Souhaits sincères de bonne santé globale et de résilience à toutes et tous.